sábado, 16 de maio de 2015

CHÂTIMENTS COMME MÉTHODE PÉDAGOGIQUE

Une société chrétienne éduque ses enfants avec le bâton en cas de besoin, et les enseignants devrait être déléguée cette autorité sur les élèves. Scribe Valdemir Mota de Menezes


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LES CHÂTIMENTS COMME MÉTHODE PÉDAGOGIQUE ; QUAND LE PÈRE DÉLÈGUE SON AUTORITÉ AU MAÎTRE.


Au IIIème siècle avant notre ère, Hérondas décrit, dans un de ses mimes, le désœuvrement d’une mère face à l’attitude de son fils et l’aide qu’elle demande à un maître d’école. Son fils est un véritable vaurien qui passe son temps à jouer aux dés plutôt que d’étudier, à tel point qu’il ne sait même pas lire la première lettre de l’alphabet. Lorsque sa mère essaye de faire preuve d’autorité, le gamin fugue ou monte sur le toit et casse les tuiles. Le maître d’école, Lampriscos, coupe court aux lamentations maternelles  et demande à un de ses élèves de lui apporter son fouet (ou un bâton) afin de rendre Cottalos plus sage qu’une « jeune fille ». Cottalos tente de négocier le nombre de coups de fouets. Pour le faire taire le maître le menace d’une muselière[i].
L’enseignement aussi bien en Grèce qu’à Rome est fondé sur le principe de la répétition et de l’imitation. Les châtiments corporels que l’on trouve fréquemment mentionnés ont pour but de corriger le corps de l’enfant et donc sa capacité à apprendre en application du principe qui veut que le corps et les attitudes soient le miroir de l’âme et du caractère. Le châtiment n’est donc pas entendu dans le sens strict de la punition ; c’est un outil pédagogique qui fait partie intégrante de la formation d’un individu. Dans le Protagoras, Platon formule ainsi cette idée :
« S’il est docile à ses leçons, tout va bien ; sinon, ils (les parents et les maîtres) le redressent par la menace et les coups, comme un arbre tordu et courbé »[ii].


Dans un extrait des Lois, Platon compare l’enfant à un animal et comme tout animal, il ne peut se passer de pasteur ou de maître. Mais à la différence des autres animaux, celui-ci est doué d’un germe de raison qui rend le dressage beaucoup plus difficile[iii]. Les auteurs latins ont livré également plusieurs témoignages qui vont dans le même sens que les précédents, tout en donnant une place plus importante aux souvenirs et au vécu. Juvénal évoque à deux reprises le souvenir douloureux de la férule sur un ton très critique à l’égard du maître Rutilus :
« N’est-il pas plutôt un professeur de cruauté ce Rutilus qui met sa joie dans le bruit cruel des coups, pour qui le chant des sirènes n’est pas comparable à la musique des fouets »[iv].
Si la plupart des auteurs latins ne remettent pas en cause les châtiments comme mode d’éducation, ils n’hésitent pas, pour autant à critiquer le professeur qui en abuse[v]. Ils nous laissent également entrevoir les conséquences psychologiques que peuvent avoir de telles méthodes. Lucien de Samosate, au IIème siècle de notre ère, mentionne les pleurs des enfants sortant de chez leur maître, la figure triste de ceux qui se rendent à l’école, le dégoût pour les études de certains enfants et la réaction des parents face à la réussite ou à l’échec scolaire :
« Mon fils a bien écrit, donnez-lui à manger ! Il a mal écrit ne lui en donnez pas ! »[vi].
On peut s’étonner de la permanence d’un tel modèle éducatif sur la longue durée. Très peu d’auteurs critiquent ces méthodes pédagogiques car elles renvoient à la vision et au traitement des corps dans l’Antiquité[vii]. Le corps est considéré comme malléable et façonné par ceux qui l’éduquent, c’est-à-dire le père et le maître. Il peut néanmoins paraitre surprenant que l’on réserve aux enfants un traitement similaire à celui des esclaves et certains auteurs s’en émeuvent[viii]. Il faut sans doute voir dans ces châtiments une part d’humiliation pour celui qui n’est pas encore un citoyen ; une volonté de rabaisser temporairement à la condition la plus méprisable qui soit.
Nulle autre cité n’a associée plus étroitement éducation et châtiments que Sparte. Dans la cité lacédémonienne, le dressage des corps visent à l’obéissance absolue et à la formation militaire. Toute l’éducation délivrée va dans ce sens. A partir de l’âge de 8 ans, l’enfant quitte sa famille pour vivre avec ceux de son âge. Organisés en « bouai », c’est-à-dire en troupeaux de bovins, ils sont commandés par des chefs de leur âge : « les bouviers ». Ils sont soumis à une discipline militaire et aux sanctions qui l’accompagne sous l’autorité du pédonome et des portes-fouets. A partir de 12 ans, les enfants vivent dans des casernes. Ils dorment sur des roseaux, ils marchent nus, leur crane est rasé et ils ne reçoivent qu’un seul manteau pour l’année. Leur nourriture est en quantité insuffisante et ils doivent en voler sans se faire prendre. Cette volonté d’endurcir et de pousser au vol sert à distinguer les plus audacieux et les plus rusés. Les différentes dispositions de ce système éducatif, qui n’est pas sans rappeler certains mouvements de jeunesse du XXème siècle, ne sont pas considérées comme des châtiments par les Spartiates mais comme le meilleur moyen de modeler les corps en vue de leur futur rôle de citoyen.

[i] Hérondas, Mime, III
[ii] Platon, Protagoras, 325 d
[iii] Platon, Lois, 808 d-e
[iv] Juvénal, XIV, 18-19, voir également Juvénal, I, 15
[v] Juvénal, XIV, 18-19 ; Horace Epitres, II, 1, 70, Suétone, Les Grammairiens et les Rhéteurs, 9, 2
[vi] Lucien de Samosate, Le Parasite, 13
[vii] Quintilien, I, 3, 14
[viii] Quintiline, I, 3, 14. Le fouet est souvent la punition réservée aux esclaves.


  • Laes, Christian. Children in the Roman Empire: Outsiders Within. Cambridge: Cambridge University Press, 2011.
  • Laurand, Valéry. “Du Morcellement à La Totalité Du Corps : Lecture et Interprétation Des Signes Physiognomiques Chez Le Pseudo-Aristote et Chez Les Stoïciens.” In Penser et Représenter Le Corps Dans l’Antiquité, 191–207. Pr. Universitaires de Rennes, 2006.
  • Legras, Bernard. Education et culture dans le monde grec: VIIIe siècle av. J.-C.-IVe siècle ap. J.-C. Cursus. Paris: A. Colin, 2002.
  • Legras, Bernard. “Violence ou douceur. Les normes éducatives dans les sociétés grecque et romaine.” Histoire de l’éducation no. 118 (April 1, 2008): 11–34. doi:10.4000/histoire-education.2018.
  • Marrou, Henri-Irénée. Histoire de l’éducation dans l’antiquité. Collections Esprit. Paris: Éditions du Seuil, 1948.
  • Prost, Francis, and Jérôme Wilgaux. Penser et Représenter Le Corps Dans l’Antiquité : Actes Du Colloque International de Rennes, 1-4 Septembre 2004 / Sous La Dir. de Francis Prost et Jérôme Wilgaux. Rennes: Pr. Universitaires de Rennes, 2006.
  • Rawson, Beryl. Children and Childhood in Roman Italy. Oxford New York: Oxford University Press, 2003.

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